15/07/2020 – Refuge des Cortalets => Refuge des Mariailles par GR10
Jour 7 : « Canigou, 5 preuves de vitalité, 1 preuve d’amour » – Slogan publicitaire
Point culminant : Pic du Canigou (2785m)
Distance : 19,6 km
Temps : ~7h
Début de journée avec un café et une lumière bizarre. Un voile diffuse la lumière et on peut voir différentes strates de nuages entre la mer et le haut du Canigou. Certaines très fines en dessous, d’autres plus joufflues plus haut. La météo annoncée est mauvaise et le vent généreux.
Le lever d’un soleil rose fluo, un énorme dragibus qui surgit de la mer et vient adoucir et rosir la face escarpée et ferreuse du Canigou.
Il me tardait qu’il se lève, le duvet est finalement un peu fin et au-dessus des 2000m, la nuit peut être fraîche et longue pour les pieds …

Montée par la crête du Barbet, très ferreuse elle aussi, cueilli par un vent frais. En haut, rencontre avec les premiers isards, qui vont prendre leur petit déjeuner, en famille. Une harde composée d’adultes au poil épais et d’adolescents encore un peu duveteux, tout aussi portés sur le jeu que sur la bouffe. Ça saute, ça court, ça mange, ça se poursuit, ça se gratte, ça sent le stress à plein nez.
Comme prévu, montée en léger au sommet du Canigou par la cheminée, le chemin est évident, dans un brouillard épais qui met dans l’ambiance direct. Le fait de ne pas voir le sommet, rend la face encore plus imposante, plus austère, plus mystique.
Plusieurs légendes autour du Canigou :
- Dieu fît naître de la trace de son index le mont Olympe, de celle de son majeur le mont Sinaï et de celle du pouce le mont Canigou.
- Selon l’Ancien Testament : après le déluge, Noé aurait amarré son arche sur un des monts du Massif du Canigou, l’anneau au Roc dels Moros, ou le pic Barbet.
Bon, par contre, arrivé en haut dans une brume aussi épaisse qu’une bonne vraie garbure, je n’ai pour vue que l’immense croix et la table d’orientation du sommet. Le reste, c’est zéro nuance de gris.
Je peux constater les divers impacts de foudre et je me demande vraiment si elle ne tombe jamais deux fois au même endroit … Après quand même 20mn d’attente, le voile gris uniforme disparaît un peu et la table d’orientation devient un peu plus utile.
Cela permet de voir épisodiquement, non seulement le refuge, la suite de l’aventure, c’est-à-dire le pic du Carlit, mais aussi le début : la Méditerranée, déjà loin.

5mn de fenêtre pour regarder et le tout se rebouche … Il reste plus qu’à redescendre par la même cheminée bien content de ne pas avoir les 15 kg sur le dos. Ça reste du très abordable, mais le confort du léger est apprécié.
La descente continue toute douce dans la vallée, passant près d’un des abris les plus mignons que j’ai pu voir, hyper bucolique avec son torrent et son petit drapeau de prières népalais.
Fin d’étape dans la forêt pour arriver au refuge des Mariailles, où le dîner sera excellent. En face, le Roc des Mariailles est juste hypnotique et donne envie de mettre les chaussons d’escalade.
Une énorme canine de plus de 600m de haut, que je scotche tout l’après-midi, et qui éclipse le Canigou, pourtant juste derrière, par sa beauté.
Le coucher de soleil, comme la veille, comme l’avant veille … sera sublime. A travers les couches de nuages, le soleil illuminera un segment de forêt comme un immense spot doré. Indescriptible, même la photo n’arrive qu’à peine à donner un aperçu de la magie du moment.
Temps de rejoindre la tente, demain, passage en Espagne !

16/07/2020 – Mariailles => Ull de Ter par HRP
Jour 8 : « La mauvaise réputation du charognard est déjà faite dès la naissance » – Proverbe Burkinabé
Point culminant : Porteils de Morens (2381m)
Distance : 22,8 km
Temps : ~7h45
Étape interdite aux solex ou deux roues motorisés, strictement signifié d’entrée par un panneau. Les gens sont encore pas trop mal éduqués, je ne croiserai ni solex, ni deux roues motorisés aujourd’hui.
La frontière est devenue une vraie barrière physique, minérale et visuelle. Après une montée sur de longs plateaux fleuris, le chemin suit une crête qui émerge d’une mer de nuages. Les nuages français stagnent, et les espagnols sont poussés par un vent du sud assez puissant et viennent s’échouer sur la roche.
Les cols sont exposés à des vents violents venant d’Espagne, et le Col du Vent pour le coup porte bien son nom … Doit y avoir de la rafale à bien 70km/h, ça serait pro de parler en nœuds, mais j’ai la flemme de faire la conversion.
Les hauts plateaux marécageux, constellés par une multitude de fleurs et de couleurs accueillent quelques chevaux sauvages et des brebis.
Le sentier les sillonne au milieu des violettes, du jaune avec les adonis des Pyrénées, du blanc avec les gaillets et les cardamines, les teintes bleu-violet des chardons.
Le vent et la distance (~25km ) ont rendu cette étape un peu plus longue et plus énergivore que prévu. Une fois une variante du GR11 récupérée, il reste une dernière montée dans une station de ski fantôme, sans âme, qui rend le final interminable.

Peut-être que le détour quelques heures plus tôt, au fond d’un vallon, pour assister à un repas de vautours, a laissé quelques traces dans les jambes …
D’en haut de la crête, on ne voyait rien mais le vent ramenait du bas du vallon, un énorme braillement d’animaux, genre un « rooooaaaaaaah ». Un vortex de vautours descendait vers l’origine des bruits. 500m plus bas, au bout d’un replat servant de piste d’atterrissage, apparaît une carcasse de vache. Deux vautours sont perchés dessus et se bataillent la place, à coup de serres, d’ailes, de becs et de cris rauques , genre les « rooooaaaaaaah » précédemment cités.
Plein d’autres regardent la scène, d’un peu plus loin, quelques-uns avec les ailes déployées comme des cormorans, en attendant que les plus vaillants arrivent à en percer le cuir. La carcasse étant toute fraîche, le cuir est encore hyper résistant et les coups de becs sont violents mais pour l’instant inutiles. Du coup, ils attaquent par les orifices naturels et c’est beau à observer, mais pas vraiment beau à voir… Je me rêvais le portrait du charognard à la tête ensanglantée, ça ne sera pas pour cette fois.
Parfois un vautour atterrit, s’approche et fait fuir tout le monde, il doit exister un système de hiérarchie mais je n’arrive pas à comprendre.
Ce qui est sûr, c’est que vu l’encaissement du vallon, et de la ventrée qu’ils comptent se mettre, va falloir sérieusement battre des ailes pour redécoller. Ou peut-être qu’ils ont vachement de forces dans leurs mollets et peuvent sauter hyper haut.

Vient le réconfort d’un bivouac bien mérité, au-dessus du refuge d’Ull de Ter, près d’un torrent bien frais, idéal pour la toilette et la séance de cryogénie naturelle sur les muscles. J’avais prévu d’avancer jusqu’à la vallée de la Carança initialement, mais j’estime qu’il y a assez pour aujourd’hui.
Je monte la tente sous l’œil et les conseils d’une mésange charbonnière et son doux chant. Un peu plus haut, quelques isards, sentinelles sur les crêtes, mangent, font leur toilette (se grattent) et jouent.
Le réconfort d’un ( deuxième ) bocadillo espagnol immense, la fraîcheur d’un torrent sur le corps, la chaleur et la beauté d’un petit feu de camp à la tombée de la nuit et l’indescriptible beauté d’un coucher de soleil rose sur une mer de nuages … Merci.

17/07/2020 – Ull de Ter => vallée d’Eyne par HRP
Jour 9 : « Si l’on savait où le loup passe, on irait l’attendre au trou. » – Proverbe Savoyard.
Point culminant : Puig De la Fontnegra (2728m)
Distance : 18,6 km
Temps : ~6h30
Comme chaque matinée, je ‘rembobine’ les actions de la veille. Laver, ranger, sécher, packeter, se remettre en tenue et généralement, en 1h, tout est prêt. Quelques étirements et un peu de yoga pour tout réveiller et on peut repartir crapahuter, sur les coups des 9h30.
Étape de nouveau sur la crête, la tête au-dessus des nuages côté Espagne et France. La végétation s’amoindrit et les sentiers sillonnent uniquement sur de la caillasse. Beaucoup de vent qui fait onduler la mer de nuage et le sac à dos.
Sur les flancs d’en face, je peux apercevoir, je pense, facile, une centaine d’isards, des hardes compactes et bien synchronisées. Bon …. sauf quelques tout jeunes qui ont encore du mal avec la stratégie de groupe.
Passage à côté du pic d’Infern, zone où pas une vallée ni un sommet n’apparaît sans trailer dessus. Des points fluos partout, boostés par leurs performances Strava, pensant que le sentier est le leur. Je m’excuse auprès du trailer espagnol à qui j’ai du faire perdre une précieuse seconde en gênant sa descente, lorsqu’il m’a bousculé direction le pierrier …
Au milieu de ce « spectacle », je m’isole et je déjeune proche d’un névé, où une niverolle, moineau des Pyrénées, s’amuse clairement à faire de la luge dessus … Elle a vraiment l’air d’être en pleine conscience et d’apprécier ce jeu. Ou alors elle a des vers et elle fait comme les chiens qui se frottent sur les tapis, mais vu qu’elle a pas de pattes de devant, elle doit le faire en atterrissant …
La cible initiale était la descente par la vallée de la Carança et son chapelet de lacs. Un vent très fort en provient et les lacs sont tous ridés. Le gardien du refuge d’Ull de Ter m’a dit que la vallée d’Eyne accueillait de temps en temps des loups … Bon je me doute que y’a un bon 0,001% d’en voir vraiment (et encore), surtout en cette période estivale. Quand je vois dans les Asturies où la concentration est plus grande, comment ils ont du mal à les voir et les méthodes utilisées, ça sent l’échec. Je m’y enfonce, mais à la place des loups avec des louveteaux trop mignons qui prennent la pose, des familles en plein pique nique, des trailers et beaucoup de vacanciers …
Ascension du Puig De la Fontnegra (2728m), d’où on peut en même temps voir le Canigou, le Carlit, la Méditerranée, L’Anéto et même le pic du midi du Bigorre.
Je me sens tout petit et d’ici, le pic du Midi que je connais bien, l’est tout autant … la route est encore très longue et je peux mieux me rendre compte du fait et du à faire.
Je rejoins la réserve naturelle d’Eyne par le col de Nuria. Cette vallée est une réserve naturelle, une merveille immaculée et doit être un véritable coin de paradis pour les botanistes. Bon c’est inquestionnable qu’au Paradis, il y a des fleurs, mais il doit y avoir aussi quand-même y avoir deux trois botanistes. Doit sûrement y avoir aussi quelques courageux pionniers de l’identification des champignons, qui ont agonisé dans leur bave en se disant que le gros machin rouge vif, finalement, même une bouchée, c’est trop.
En bas, c’est le coin des vaches et elles ont encore eu la bonne idée de fraîchement miner la seule partie plate de la vallée, avec un certain sens du bien fait et du généreux. Je trouve un spot « moindre mal ». Une zone pas trop en pente proche d’une cabane de bergers. Ou plutôt … un abri en pierre, avec la porte la moins large du monde ( difficile d’y passer même de profil ) et avec à l’intérieur, deux planches aussi vieilles que la cabane.
Je croise un berger du coin qui monte vers sa cabane en dur. On partage une pause et il me raconte l’histoire de cette vallée, sa faune et sa flore et me confirme la présence ponctuelle des loups. Mais pas du tout en cette saison. Il est plus facile de voir des renards, martres, isards et bouquetins mais ils sont plus en fond de vallée en haute saison.
Cette nuit-là, pas un seul hurlement de loup, mais un gros concert de cloches de vaches, avec ma tente au premier rang …

18/07/2020 – Vallée d’Eyne => Les Bouillouses
Jour 10 : « Ça fait que si à’ soir t’as envie de rester
Point culminant : Estany de Les Dugues (2230m)
Distance : 25,2 km
Temps : ~8h
Réveil entouré de vaches, et de marmottes, et un jeu, genre marelle, improvisé pour éviter d’embarquer quelques kilos de bouse dans les semelles.
Je dois finir de descendre sur le petit village d’Eyne pour remonter sur le flanc d’en face, droit vers la station de ski de Font Romeu, retour à la civilisation. Là, je croise une Fiat Panda 4×4, une espèce aussi rare que les ours des Pyrénées mais tout aussi incroyable. J’en vois qu’en montagne de ça.
Arrivée sur Bolquère par la forêt domaniale, passage un peu plus bucolique que la Départementale 33, dont quelques kilomètres suffisent déjà.
J’assiste à l’entrée en gare du Petit Train Jaune, le train le plus haut de France. Un jouet à grande échelle, avec des playmobils avec la tête avec le masque sanitaire. L’histoire de ce train vaut vraiment le détour, tellement il est spécial en termes de conception et de son parcours en termes de tracé. Par exemple, il est alimenté en énergie par un troisième rail parallèle, il emprunte le premier pont métallique ferroviaire érigé en France …
Le plein de succulents produits locaux à Bolquère, j’ai envie de tout acheter, mes yeux brillent à la vue des fruits, du fromage et des saucissons … ce soir c’est festin ! et il est temps de monter se percher près d’un laquet isolé bien au-dessus des Bouillouses.

Cette partie se fait dans une station de ski, donc pas hyper sexy, avec parfois un village vacances, et parfois le chemin balisé qui remonte des pistes de VTT de descente, ce qui rend la montée très dangereuse. J’ai assez de mes 15-20kgs sur le dos, pour en plus m’embarquer un cycliste encastré dans les dents de devant …
Les premiers lacs sont pris d’assaut par les pêcheurs, les campeurs ( qui, et c’est navrant, s’en carrent complet des horaires et panneaux de bivouac et de la gestion des ordures ) et les promeneurs. Des navettes embarquent des groupes entiers qui repartent, et plus on monte, moins on voit de monde.
Un peu plus haut, je m’éloigne pour une baignade bien méritée au coucher de soleil et dîner face au Carlit qui sera au menu le lendemain. Quoi qu’une journée de repos est envisagée. Je trouve un laquet où je ne serai dérangé que par le passage d’un couple cerf/biche, qui fileront se cacher dans la basse végétation. J’hésite à leur amener des bougies parfumées et leur mettre une petite playlist de Marvin Gaye.

Dernier petit tour autour du camp pour regarder les étoiles et lire un peu. Je vois un trait dans le ciel, persistant, la comète Neowise … Je n’étais du tout informé de cette observation, possible et aussi claire, et me fait fouetter par un émerveillement. La nuit va être longue, les poses de l’appareil photo aussi … J’irai me coucher après que Neowise y aille aussi, et elle disparaît assez rapidement derrière la crête du Carlit.
Un moment intense pour les yeux, le cœur, les batteries et la carte mémoire du reflex.
19/07/2020 – Estany de Les Dugues => Estany del Forats
Jour 11 : « L’envie n’a point de repos » – Proverbe Oriental.
Point culminant : Puig Carlit (2921m)
Distance : 14,9 km
Temps : ~5h
On avait dit Repos. Sauf que la comète a tout fait foirer. C’est quand même malheureux qu’une caillasse décide de passer tous les 6800 ans et c’est pile mon jour de repos …
Pour la voir mieux, du moins plus longtemps, il faudrait passer de l’autre coté du Carlit. Mais avant, faut recharger les batteries, vides. Le seul spot à énergie se trouve en bas, au lac des Bouillouses, 1h30 plus bas …
Donc, descente en courant, et vrai départ à 10h30, mais vrai petit dej et tout suffisamment chargé pour refaire un timelapse plus abouti …
Direction le Carlit, 2921m, superbe pic granitique, amusant à grimper par les petites cheminées où faut quand même mettre un peu les mains.
En bas, je croise un panneau indiquant une montée réservée à des randonneurs expérimentés, car un peu technique, et un groupe d’adolescentes en converse, t-shirt Guess trop petit et short en jeans. Amusant. Je repense au guide de l’été dernier.

Un peu plus d’une heure après, l’orage au sommet menace. Entre le sommet et l’orage, un vautour, un planeur et un parapentiste, facile de savoir sur qui miser. La vue est dingue et les nuages qui défilent à fond projettent leurs ombres et changent les coloris des plateaux environnants.
Derrière moi, le mignon chapelet de lacs des Bouillouses, au loin la vallée d’Eyne, et devant moi à l’Ouest, un laquet juste en bas promet un reflet nickel pour le coucher de la comète.
Le pierrier de descente côté Ouest entre facilement pour moi dans le top 5 des pierriers les plus horribles des Pyrénées, sur-abrupt , sur-poussiéreux et sur glissant. Je sais pas si je préfèrerais le monter que le descendre mais là de suite, j’ai pas du tout envie d’avoir la réponse à cette question.

Bref, finalement en bas, recherche du point de vue finie, le vent tombe, les lacs se transforment en miroirs, des jeunes isards jouent sur les névés à la tombée de la nuit, les étoiles apparaissent. Je me retrouve seul dans la vallée et tout semble s’aligner pour quelques heures de spectacle, condensée en quelques secondes.
Comete Neowise qui se couche derrière les montagnes
20/07/2020 – Estany del Forats => Cabane de Cortal Rosso
Jour 12 : « Je sais déjà, par expérience, que les bois nourrissent les poètes, et que les cabanes de berger abritent les philosophes. » – Don Quichotte, Miguel Cervantes.
Point culminant : Estany del Forats (2457m)
Distance : 10,2 km
Temps : ~ 3h45
Lever de soleil dans le calme le plus total et la fraîcheur de l’ombre du Carlit. Neowise a donné un spectacle sublime dans un ciel clair.
Je ne sais pas trop ce qui m’attend pour cette étape en termes de montée, mais avant de me mettre en route, j’entends puis j’observe un randonneur qui attaque le pierrier du Carlit que j’ai descendu la veille. Il avance tout doucement et les cailloux roulent sous ses pieds. Je peux constater sa progression pénible. 3 pas en avant et un en arrière. Je suis tellement content de ne pas avoir oublié mes lunettes au sommet.
Repaquetage de plus en plus robotisé et de plus en plus rapide, puis descente tranquille jusqu’au barrage de Lanoux, sur la droite un peu en contrebas, massif.
Le chemin suit de nouveau le GR10 jusqu’à Porté Puymorens, et me mène dans un petit vallon rempli de marmottes en plein matchs de catch. Et comme d’habitude, je bloque sur ce documentaire animalier live, pendant une bonne demi-heure. Je fais même un peu la voix off et les dialogues dans ma tête, je suis sûr que la plus claire des marmottes zozote.
L’étape, dont le terminus était initialement prévu en Andorre, se termine finalement toujours dans les PO, à la cabane de Cortal Rosso, arrêtée par d’énormes averses.
J’avais prévu de dormir dans un abri, érigé à l’époque de l’exploitation de mines de fer, à quelques kilomètres de là. Deux marcheurs, un Catalan et un Ecossais arrivés trempes, et les averses, m’en ont dissuadé.
Cet abri a été pris d’assaut par les troupeaux de vaches du coin et a été transformé en latrines géantes, et pas que depuis hier. Ils m’indiquent que même si je trouve un spot immaculé pour y poser ma tente, c’est mes narines qui mettront le véto.
La tempête s’arrête, les nuages se dissipent, on peut de nouveau apercevoir la colline en face, qui est devenue blanche de grêle.
Mes deux compères m’exposent la théorie des 10 minutes.
Le genre de théorie où la réalité de la météo affronte la motivation, l’enthousiasme, la gestion du timing et la détermination des deux marcheurs. Si la grêle s’est arrêtée depuis 10mn, et que c’est toujours clair, alors c’est l’heure de repartir.
Le problème avec les théories qui ont la météo comme paramètre, c’est que ça peut vite aller de paire avec quelques grossièretés, et avec la théorie de « comment on va faire sécher tout ça maintenant » ?
Je les verrai se faire bien saucer à un peu plus de 500m de la cabane, 10mn après leur départ. Mais ça ne les fera pas revenir pour autant.
Une bonne demi-heure après, le ciel s’éclaircit et le temps de mon dîner, je vais avoir la chance de pouvoir observer un cerf, une biche, et leur faon profiter du calme, un peu plus bas, pour venir brouter.

Je m’installe dans cette cabane spartiate, la seule présence d’une chaise et ses murs brûlés et piteusement graffés au charbon, donnent plus l’impression d’une salle de torture d’un camp cambodgien, que d’un refuge de montagne.
Les averses intenses justifient bien la nuit sous un toit ( et sur un sol ) en dur, la dernière dans les Pyrénées Orientales, pas de photo nocturne.
La suite ici : https://damienferbos.fr/hrp-traversee-de-landorre/